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Tuer le cancer de Patrizia Paterlini-Bréchot

Tuer le cancer de Patrizia Paterlini-Bréchot

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« Tuer la cancer.. avant qu’il ne vous tue »  ai-je envie d’ajouter ! Voila le grand projet de Patrizia Paterlini-Bréchot qu’elle est en passe de réussir pour le plus grand bien de l’humanité toute entière.  Et si le « méchant cancer » finissait par mourir ?  Après deux décennies consacrées à comprendre le tueur plus ou moins silencieux, elle a travaillé à découvrir un moyen de le dépister très très précocement, afin de ne pas lui laisser l’opportunité de s’installer, de coloniser un organe, puis d’autres et faire mourir son hôte. Avec son équipe à l’Université Paris-Descartes et à l’Inserm (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale), elle a trouvé le moyen de détecter sa présence dans l’organisme, à partir d’une simple prise de sang : le test Iset. Elle nous raconte son parcours du combattant dans un livre qui m’a fortement émue.

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Le cancer, un tueur « connu » depuis les Pharaons

On étiquette à tort le cancer comme étant une maladie de notre civilisation, liée à la pollution, comportements alimentaires, sédentarité.. même si ces facteurs potentialisent sa survenue, sans aucun doute. Le cancer est une maladie décrite depuis l’Antiquité. C’est le médecin grec Hippocrate – 460-370 av. JC- qui, en comparant les tumeurs à un crabe, le baptise « karkinos » et « karkinoma » et Galien – 131-201 av. JC-  son confrère installé à Rome utilisera le terme « oncos » pour décrire ces tumeurs qu’il ne parvient pas à guérir. Le cancer est décrété « maladie incurable » dont les manifestations sont dues à un excès de « bile noire» qui se solidifierait sur un organe, croyait-on.

Il faudra attendre le XVIIème siècle pour tordre le cou à cette croyance ! Daniel Sennert -1572-1637- médecin  allemand, croyant que le cancer était une maladie contagieuse, isolait ses patients atteints de tumeur. Les traitements allaient de la saignée – parfois 5 à 6 par jour – à l’application de ciguë  ou de pommade à base d’arsenic sur la tumeur pour la faire réduire. Nous devons à Claude Gendron, neveu du médecin de la reine Anne d’Autriche, mère de louis XIV morte d’un cancer du sein – l’idée de la chirurgie pour déraciner la tumeur, car il avait compris qu’à ces débuts elle est localisée et donc extirpable sans trop de dommages collatéraux.

Au Moyen-âge, en France, Henri de Mondeville écrivait en 1320 : « aucun cancer ne guérit, à moins d’être radicalement extirpé tout entier. En effet, si peu qu’il en reste, la malignité augmente dans la racine. »

L’emploi du microscope constitue un tournant décisif dans la recherche sur le cancer avec les travaux de René-Théophile Laennec –   – à qui nous devons aussi le stéthoscope qui découvre le mélanome  et Marie François Xavier Bichat

Qu’est-ce qu’un cancer ?

Tout le monde a été touché soit dans sa chair, soit avec un de ses proches par ce cancer. Les statistiques – je sais que nous ne sommes pas des statistiques – nous disent qu’une femme sur trois sera touchée par cette maladie avant 85 ans et un homme sur deux.. Elle fait très peur, à juste titre, même si aujourd’hui, deux cancers sur trois sont guéris. Oui, guéri, pas seulement en rémission.

David Khayat: « Près de 60% des adultes atteints de cancer vont guérir en France »

Le cancer est une maladie caractérisée par la prolifération incontrôlée de cellules.  Suite à une agression ou un dommage et liée à une modification de la structure d’un gène : une cellule se modifie dans son ADN et devient totalement indisciplinée et incontrôlable. Le phénomène s’appelle une « mutation »Journalièrement, notre système immunitaire veille à les éliminer. Mais, un jour, ce jour-là, il est débordé ou trompé et c’est le début d’une longue et douloureuse histoire.. 

Ces cellules cancéreuses sont des caricatures de cellules dont elles sont issues : leur noyau est plus volumineux, traduisant leur intense activité,  leur taille est également plus grande, leur membrane cytoplasmique est toute cabossée. La cellule cancéreuse se multiplie beaucoup : elle va former un regroupement. Il faut un regroupement d’environ 100.000 cellules pour que l’on commence à parler de tumeur.

Tuer le cancer, le livre 

Il est certain qu’avec un tel titre, le buzz était assuré ! Patrizia Paterlin-Bréchot est oncologue et hématologue, professeur de biologie cellulaire et moléculaire appliquée à l’oncologie et a déjà à son actif un test Diagnostic prénatal non invasif de la Mucoviscidose. Son histoire contre le cancer commence avec un malade terrorisé à l’idée de souffrir, comme son père avant lui, d’un cancer du pancréas, l’histoire de son « patient zéro ». Un épisode très émouvant, dramatique, qui va lui cheviller au corps et à l’âme, cette envie d’aider les patients et de vouer sa vie à « tuer le cancer ».  Cette  » amoureuse de la médecine  » se raconte, elle se livre dans son humanité. Je l’admire beaucoup, elle est une magnifique personne, dans tous les sens du terme. Ce livre est très prenant, l’émotion est presque à chaque chapitre. Il est scientifique mais l’alternance de chapitres où elle se raconte, rend l’ouvrage très accessible.  Elle ne nous cache rien : ni les guerres intestines entre laboratoires ou scientifiques, ni le marché lucratif et mercantile qu’est le cancer. 

Elle nous fait suivre sa traque sans relâche de son ennemi, tueur en série. Nous suivons son travail de Sherlock Holmes afin de trouver la faille, le talon d’Achille du cancer parce que pour atteindre l’ennemi, il faut bien le connaitre. Qu’est-ce qui pousse une cellule à proliférer ainsi, plutôt de suivre le programme ? Elle reste convaincue qu’il n’est pas tout-puissant.

Avant de coloniser un organe, le cancer peut rester de nombreuses années, au stade invasif : c’est là qu’il est vulnérable. En effet, repérer les CTC – cellules tumorales circulantes- permettrait de détecter précocement le risque de métastase. Les cellules cancéreuses circulantes (CCC) sont des cellules rarissimes qui se détachent de la tumeur primaire et circulent dans le sang. Elle narre les avancées, les reculs, les déceptions, les espoirs et la victoire. Euréka, elle a trouvé, enfin son équipe auquel elle rend hommage car sans ce travail d’équipe aux petits moyens, rien ne serait arrivé sans doute. La machine qu’elle a conçue ressemble, dit-elle, à « une chimère de photocopieuse et de cafetière ». Mais elle est capable de détecter une seule cellule tumorale dans 10 millilitres de sang, « donc perdue au milieu de 100 millions de globules blancs et de 50 milliards de globules rouges »

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Le professeur Patrizia Paterlini-Bréchot

La technologie ISET®

La clinicienne l’a baptisé comme l’épouse de Ramsès II car à l’époque elle lisait Christian Jacq mais surtout parce que c’est l’acronyme de « Isolation by SizE of Tumor Trophoblastic celles- » en français isolement par taille des cellules tumorales, qu’elle nommera plus tard CCC pour Cellules Cancéreuses Circulantes. C’est une technologie innovante fournira  les meilleurs méthodes diagnostiques aux patients atteints de cancer, pour sauver des vies grâce au diagnostic précoce de l’invasion tumorale et des cancers invasifs.

ISET est capable de détecter une tumeur naissante mais pas de la localiser. Dans le cas d’un diagnostic positif, il faut nécessairement passer un scanner ou un IRM de tout le corps.

En revanche, si la tumeur naissante est trop petite pour être détectée à l’imagerie, le patient n’a pas d’autre choix que d’attendre et surveiller. Elle raconte le cas d’une amie qui travaille avec elle qui était porteuse du gène BRCA susceptible de provoquer un cancer du sang. Le test révéla des CCC : elle décida d’agir en amont, et de pratiquer une mastectomie bilatérale prophylactique. Huit ans après, elle va très bien. 

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Extrait d’un diaporama du Dr Benjamin Besse – Parrainage Chercheur Gustave Roussy – Cancer du Poumon

Vous m’objecterez à juste raison que les marqueurs tumoraux détectent déjà des molécules fabriquées par les cellules cancéreuses ou par le corps : il s’agit de marqueurs indirects.

Les professeurs Paul Hofman et Charles-Hugo Marquette, à Nice, ont permis de diagnostiquer, parmi 245 patients, gros fumeurs atteints d’une bronchopathie obstructive, ceux qui allaient développer une tumeur, plusieurs années avant que le cancer du poumon ne soit visible sur une radiographie ou un scanner. « Le test Iset permet d’intervenir très en amont, alors que 75 % des cancers du poumon ne peuvent plus être opérés quand ils sont détectés parce qu’ils en sont à un stade trop avancé et ont déjà produit des métastases », écrit-elle.

Le nerf de cette guerre est l’argent. Une partie des recettes liées à la vente de son livre vont être utilisées pour les études. Mais, ce n’est pas suffisant :  Le professeur Paterlini-Bréchot a choisi une méthode originale pour ce faire : elle a choisi de vendre « sa » machine à des laboratoires qui vont alors participer aux études en l’utilisant. Une trentaine de laboratoires de recherche internationaux utilisent l’ISET dans leurs travaux. La technologie ISET® est basée sur une simple prise de sang, indolore pour les patients. Le sang est alors traité par un appareil spécifique, le Rarecells® Device, qui permet une filtration verticale du sang afin d’isoler les très rares CCC. Seule pierre d’achoppement : il coûte 486 euros et n’est pas remboursé.

Ce livre est un message d’espoir, tout comme le test ISET !

«Tuer le cancer» de Patrizia Paterlini Bréchot, Edition Stock. 250 pages. 19,50 €.

 

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PLK

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Apprentie-sage, à la fois frivole et mystique, lègère et spirituelle , gourmande et orthorexique, férue de nutrition, en recherche de sagesse

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