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Maria Callas, la cantatrice légendaire aux trois octaves

Maria Callas, la cantatrice légendaire aux trois octaves

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Maria Callas nous a quitté il y a 40 ans. Très respectueusement appelée « la Callas », elle a bouleversé l’art lyrique du 20ème siècle, sans aucun doute. Elle fit son entrée sur la scène de la vie d’une étrange façon, en tout cas sans aucun empressement, elle la finira seule. A 53 ans, « la diva assoluta » mourait dans son appartement parisien au 36, avenue Georges-Mandel,  où elle vivait depuis 1968 et le mariage d’Onassis avec Jackie Kennedy.

« Les dieux s’ennuyaient, ils ont rappelé leur voix. » Ce sont les très jolis mots d’Yves Saint Laurent à la mort de Maria Callas, le 16 septembre 1977.

Un hommage pour célébrer le 40ème anniversaire de la mort de Maria Callas

Comme moi, vous auriez peut-être aimé voir et entendre la Callas sur scène ? Ou mieux, l’approcher comme un intime ? L’occasion nous est donnée : l’ exposition « Maria by Callas » présentée par Jean-Luc Choplin à La Seine musicale et produite par le département des Hauts-de-Seine. Tom Volf, qui fut son collaborateur au Théâtre du Châtelet en est le commissaire. Et pourtant rien ne l’y prédestinait ! C’est intéressant que je vous raconte sa rencontre avec Maria car elle explique la sensibilité, l’amour, la vénération, la chaleur, l’émotion qui se dégagent de cette exposition.

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Il est tombé dedans un peu par hasard. Pas du tout fan d’opéra, il ne la connaissait même pas il y a encore quatre ans ! Il a « rencontré » Maria Callas en 2013 ! « Le hasard c’est Dieu qui se promène incognito » disait Einstein. Évidemment….

Au cours d’un séjour à New York, errant dans les rues, surement un peu nostalgique de la France, passant devant le MET, il décide d’y rentrer. Cela se fait d’aller au MET lorsqu’on est à NY ! On y joue Maria Stuarda, de Donizetti. Il prend un billet à 10 $, ne songe pas à rester, s’installe au fond. Mais, figurez-vous qu’un monsieur lui offre un billet car son épouse est malade et comme les choses sont bien faites…. en corbeille  : le voila super bien placé pour écouter son premier opéra.  Le choc est violent, il en est bouleversé : les décors, les voix, la musique… Rentré chez lui, il fouille le net afin de savoir qui est ce Donizetti, le bel canto…. et voila que Maria Callas apparaît en « Lucia di Lammermoor », son grand rôle.  Coup de foudre immédiat ! Il poursuit alors une quête effrénée et passionnée pendant trois ans sur les traces de la plus célèbre des soprano dont il reconstruit aujourd’hui la vie et le destin, pour notre plus grand bonheur.

« J’aimerais être Maria mais il y a Callas pour qui je dois être à la hauteur », écrit-elle.

Maria  Callas traverse ses étapes professionnelles et humaines en même temps

Sa venue au monde serait-elle un prémisse à sa vie future ? Toutes les bonnes fées ne se penchent pas sur son berceau ! Un vrai mélodrame. Maria portera sur ses épaules un lourd héritage : remplacer un frère décédé à l’âge de 3 ans. Durant toute la grossesse, Evangilia – sa maman – attend un remplaçant de Vassily. Lorsque Maria voit le jour à NY – les Kalogeropoulos ont émigré il y a 4 mois – , il neige. Evangelia Kalogeropoulos qui vient de donner la vie à celle qui sera une extraordinaire diva, mondialement connue, détourne la tête, en disant : « Amenez-la, je ne veux pas la voir.. ». Quant à George son père, il baisse la tête, sans réaction…. L’accoucheur le docteur Lantzounis qui sera d’ailleurs son parrain, la prend dans ses bras et la confie à une infirmière, totalement désemparée par un tel accueil. Lorsqu’elle demande le prénom de leur fille afin de l’inscrire sur le bracelet, elle n’obtient qu’un silence pesant. Puis, dans un soupir, la jeune accouchée précise Sophia, tandis que le père s’interpose en souhaitant l’appeler Cécilia comme sa sœur. Quel nom fut -il écrit sur le bracelet ? Personne ne sait ! En tout cas, trois jours après, les parents s’accorde sur Maria.

Quel jour est-elle née ? La aussi, grande confusion : la mère affirme qu’elle a accouché le 4 décembre 1923, le docteur Landzounis lui dit le 2 décembre. Maria fêtera son anniversaire le 2, date qui figure sur son passeport. Elle ne parviendra jamais à remplacer ce frère idéalisé, dans le cœur de sa mère. Est-ce la racine de son éternelle insatisfaction ? Elle avouait « Je suis jamais satisfaite. Je suis personnellement incapable de me réjouir de ce que j’ai fait de bien, car ce que je fais de mal me parait beaucoup plus important »

« Je ne me suis sentie aimée que lorsque j’ai chanté », disait Maria Callas

 La Callas n’est pas née « Diva asssoluta » (diva absolue) ! Tout à chacun connait la rigueur de travail imposée par sa mère à la petite Maria Anna Sophie Cecilia Kalogeropoulos – elle sera simplement Callas dès l’école – n’est pas un secret. Maria, une fille grosse, à lunettes – elle était très myope-  qu’à 9 ans, sa mère a forcée à apprendre à chanter. De retour à Athènes à l’âge de 13 ans, elle étudie au conservatoire avec Elvira de Hidalgo qui a compris son impressionnante extension vocale et est restée une amie pour le reste de sa vie. Le 2 août 1947, elle chante à La Gioconda di Ponchielli (1), dirigé par Tullio Serafin à Verona Arena et là, c’est l’apothéose, la naissance d’une étoile ! 

Les années de Meneghini ont été les plus importantes pour sa carrière : L’ambitieux et généreux Meneghini était son mentor, l’imprésario, le mari, l’ami dont elle se séparera en 1959 pour Onassis.

La voix de la Callas omniprésente dans le casque

Car la chanteuse nous accompagne littéralement dans le parcours qui raconte les étapes de la construction du mythe et en même temps le déconstruit. Sa voix est omniprésente dans la salle et dans nos oreilles.. Il y avait peu de monde le jour où j’y suis allée, ce qui a augmenté la magie.

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Émouvante mise en scène de la  Madone de Giambettino Cignaroli, une petite peinture à l’huile offerte par son mari Battista Meneghini à occasion de la première Gioconda aux arènes de Vérone en 1947. Elle l’accompagnait partout, elle tenait à l’avoir dans sa loge sans quoi elle ne chantait pas ! Oui la Callas est une diva avec ses petits caprices. D’ailleurs, ce cliché de la diva capricieuse et fantasque lui colle à la peau. Elle était au contraire d’une humilité inouïe, au service de son art et des compositeurs qu’elle a servi toute sa vie.

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Sa transformation physique :  En 1954, elle perd 30 kg  sous l’influence de Elvira Leonardi Bouyeurein, alias Biki, la couturière du tout-Milan (elle était aussi la petite-fille de Puccini) qui va être son pygmallion et l’aider à ressembler à son image. Elles seront amies. Elle lui dessine aussi bien ses costumes de scène que ses vêtements de tous les jours, la faisant devenir la femme la plus élégante du monde.

Le 2 janvier 1958, Maria Callas ouvre la saison de l’opéra de Rome, en présence du président de la République italienne. A la fin du premier acte de « Norma », elle affirme avoir perdu sa voix et refuse de poursuivre… C’est un véritable lynchage qu’elle subit !

Onassis, le grand amour de la Callas

Ce mardi 3 septembre 1957, à Venise, au bal de l’hô­tel Danieli, elle rencontre l’armateur grec Aristote Onassis. Il a  cinquante-trois ans, un empire et une très jeune épouse, Tina. Elle a trente-trois ans, le monde à ses pieds et un imprésario de mari. Le milliardaire la fascine. Quelques mois plus tard, invitée à bord de son yacht le Chris­tina O, il lui fait la cour, elle aime ça et dans la nuit du 6 au 7 août 1959, Maria tombe dans les bras d’Onassis. Elle sacrifie alors La Callas pour Maria. Elle est très très amoureuse. Mais lui, ne tient pas parole, il ne cherchait qu’une «  femme qui en jette » ! Il ne quitte pas Tina, et ne l’épouse pas ! Elle abandonne la Callas, pour Maria .. Elle devint sa chose : il n’aime pas ses lunettes ? Elle mettra des lentilles ! Il grimaçait lorsqu’elle apparaissait dans une robe ? Elle courait se changer… Une femme très amoureuse, en témoigne cette très émouvante lettre qui me fait songer à la chanson de Brel Ne me quitte pas .. C’est aussi fort.

Hélas, c’est la diva qu’aime le Grec, pas la femme…

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Avec Grace Kelly et Onassis en 1961 ©Fonds-de-Dotation-Maria-Callas

Lorsqu’en octobre 1968, Onassis se marie avec Jackie Kennedy, elle est anéantie.. Onassis est et restera pour toujours son seul grand amour.

L’exposition MariaByCallas à la Seine musicale qu’il faut aller voir

Je n’ai pas envie de tout vous raconter… Chacun son parcours.  Vous suivrez le fil très intimiste de sa vie.. Ses essais au cinéma avec Pasolini avec Médée, un film non-musical, ses adieux à la scène,  sa vie à Paris où lui tiennent compagnie sa femme de chambre, son chauffeur – ils ont beaucoup participé à cette exposition car ils ont senti que la démarche de Tom Volf  était le partage respectueux –  et ses deux caniches, son retour, ses masters classes où elle fut une extraordinaire pédagogue bienveillante.. sa rencontre avec le ténor Giuseppe Di Stefano… son domicile… ses dernières vacances en Suisse… elle nous raconte .. et lorsque vous assisterez  à la sortie de son cercueil de l’église grecque orthodoxe d’Agio Stephanos, sous les applaudissements le l’émotion sera très forte.  Nous avons perdu un être cher.

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Cette exposition est très moderne, parsemée de documents audio-visuels extraordinaires, super 8, bandes magnétiques, vinyls-live-pirates, d’interviews en français – qu’elle parlait impeccablement – ou en anglais, qui m’ont beaucoup impressionnée tant elle est solaire, élégante, belle, ayant de l’humour, d’une grande gentillesse mais aussi grandiose, aristocratique et intimidante, de documents d’archives inédits, de photographies personnelles.. Et ce que j’ai adoré, sont les retransmissions filmées sur grands écrans à 360 degrés : dans une salle où il est possible de s’asseoir – confort spartiate il est vrai – nous assistons à Norma de Bellini à Rome en 1957, à Carmen à Londres en 1962, à Don Carlo de Verdi à Londres… Sublimes documents restaurés qui donnent de grands frissons. Quel talent, quelle voix, quelle présence ! J’en suis ressortie toute ébaudie.

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Elle meurt le 16 septembre 1977 dans la solitude. La cause de sa mort reste aujourd’hui un mystère : si la raison officielle est < crise cardiaque >, il est vraisemblable qu’elle se soit suicidée par une absorption massive de tranquillisants.

Le génie de cette exposition est de nous faire découvrir les deux femmes que fut Maria Anna Sophia Cecilia Kalogeropoulos, qu’elle n’a pas réussi à faire cohabiter, sacrifiant toujours l’une pour l’autre. Un énorme merci à Tom Volf pour ce superbe travail et ces si jolies découvertes, tous ces inédits. 

Il a collecté tellement de documents qu’il a pu écrire trois livres  : « Maria by Callas » en anglais (éditions Assouline) magnifiquement illustré, « Callas confidential » (La Martinière) et « Lettres et mémoires inachevés » (Fayard)  – une belle idée pour Noël ? – et réaliser un film « Maria by Callas- In her own words » dont la sortie sera le 13 décembre 2017.

Infos pratiques Adresse : La Seine Musicale – 1 Cours de l’Île Seguin – BOULOGNE-BILLANCOURT 92100 Exposition : MARIA BY CALLAS Du 16 septembre au 14 décembre 2017 inclus.

Pour en savoir plus sur Maria Callas, je vous recommande deux livres  : Dans la peau de Maria Callas par Alain Duault – La véritable Maria Callas Par Bertrand Meyer-Stabley

(1) inspirée d’une oeuvre de Victor Hugo, Angelo,le tyran de Padoue

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Apprentie-sage, à la fois frivole et mystique, lègère et spirituelle , gourmande et orthorexique, férue de nutrition, en recherche de sagesse

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