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Kyrie Eleison de la petite messe solennelle de Gioachino Rossini

Kyrie Eleison de la petite messe solennelle de Gioachino Rossini

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Cette année 2018, nous commémorons les 150 ans de la disparition de Gioachino Rossini, mort le 13 novembre 1868 à Passy. Il était né un 29 Février et s’apprêtait à fêter ses 19 ans … Rossini a composé près de 40 opéras en moins de 20 ans  durant cette période que nous pourrions appeler sa première période parce que étrangement après un temps très prolifique, à l’âge de 37 ans, sans donner aucune explication, Rossini met fin à sa grande carrière lyrique. Fini les opéras ! Désormais le compositeur prend le temps de vivre, de voyager, de manger (il adore ça) et recevoir ses amis.  Si Rossini s’éloigne de la vie lyrique après le succès de son fameux Guillaume Tell en 1830, ce n’est pas seulement pour prendre du bon temps. Le compositeur est fatigué, malade. Par hasard – qui vous le savez n’existe pas – , j’écoute la petite Messe Solennelle, une très belle œuvre, composé par Rossini à l’âge de 71 ans. Une merveille dont il dira qu’elle est son péché de vieillesse et que j’avais oubliée.

 

 La Petite Messe solennelle de Rossini : Pourquoi petite et solennelle ?

Composée en 1863, la Petite messe solennelle est l’œuvre la plus importante de la dernière période de Rossini, c’est-à-dire… de ses quarante dernières années ! A soixante et onze ans, il coule des jours heureux à Passy, le comte Alexis Pillet-Will lui fait parvenir une commande d’une messe, car il souhaite consacrer la chapelle privée de son épouse Louise, dans son hôtel particulier de la rue Moncey, dans le 9arrondissement de Paris.

La Petite messe solennelle est créée en la chapelle privée des Pillet-Will, le 14 mars 1864, par des chanteurs du Théâtre Italien : Carlotta et Barbara Marchisio, Italo Gardoni et Luigi Agnesi. À l’harmonium, le tout jeune Albert Lavignac (futur professeur au Conservatoire de Paris, connu de nos jours pour son guide wagnérien Le Voyage artistique à Bayreuth). L’élite musicale parisienne est présente – dans le public se trouvent notamment les compositeurs Meyerbeer, Auber et Ambroise Thomas.

« Rossini, ces derniers temps, a fait des progrès et a étudié ! Étudié quoi ? Pour ma part, je lui conseillerais de désapprendre la musique et d’écrire un autre Barbier de Séville », ironise-t-il auprès du comte Arrivabene.

Elle sera dite « petite » car elle ne réunit que quatre solistes – soprano, contralto, ténor, basse- et un chœur mixte, deux pianos et un harmonium et  « Solennelle » par sa ferveur. Écoutez, et vous la sentirez. Notons que ce n’est pas un harmonium mais un accordéon qui aurait accompagné les voix : certes plus populaire mais c’était l’idée première de Rossini.

Sur la page de garde de son manuscrit, Rossini écrit en 1863 :

« Petite messe solennelle, composée pour ma villégiature de Passy. Douze chanteurs des trois sexes, hommes, femmes et castrats seront suffisants pour son exécution, savoir huit pour les chœurs, quatre pour les solos, total douze chérubins. Bon Dieu, pardonne-moi le rapprochement suivant : douze aussi sont les apôtres dans le célèbre coup de mâchoire peint à fresque par Léonard, dit la Cène, qui le croirait. Il y a parmi tes disciples de ceux qui prennent des fausses notes ! Seigneur, rassure-toi, j’affirme qu’il n’y aura pas de Judas à mon déjeuner et que les miens chanteront juste et con amore tes louanges et cette petite composition qui est hélas ! le dernier péché mortel de ma vieillesse. »

Du vivant de Rossini, la petite messe sera exécutée deux autres fois : en avril 1865 à nouveau pour les Pillet-Will et en 1867 où il orchestre la partition. Néanmoins, ce sera toujours la première mouture qui sera la plus jouée.

Je vous propose cet enregistrement, extrait d’un concert de l’Ensemble Aedes donné dans le cadre du Festival de Saintes le 17 juillet 2015. Divin ..

Dans sa postface, le compositeur s’amusait à demander pardon au Seigneur de l’avoir quelque peu oublié au cours de sa carrière : « Bon Dieu. La voilà terminée, cette pauvre petite messe. Est-ce bien de la musique sacrée que je viens de faire, ou bien de la sacrée musique ? J’étais né pour l’opéra buffa, tu le sais bien ! Peu de science, un peu de cœur, tout est là. Sois donc béni et accorde-moi le Paradis »

Gioachino Rossini, musicien de génie

Celui qu’on appellera le « cygne de Pesaro » est né trois mois après la mort de Mozart, dans une famille de musicien : sa maman est cantatrice et son père corniste. Très vite, il semble évident que ce garçon est très doué. A 9 ans, il joue suffisamment bien du violon pour en jouer dans l’orchestre. Il ne joue pas que du violon mais aussi du cor, du violoncelle. Doté d’une jolie voix, il travaillera le chant : à 12 ans, on l’applaudit dans un opéra de Paër ! Ses progrès musicaux sont tels qu’ il est admis au conservatoire de Bologne. A 14 ans, sous la direction de la famille Monbelli, il écrit son premier opéra en deux actes Demetrio e Polibe, 1806.

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Dessin de Frederic Sorrieu représentant le chanteur Salvi dans le rôle du comte Almaviva. (Bibliothèque de l’Opéra, Paris.)

Le Barbier de Séville, en 1815, fut composé en quinze jours.  Le Barbier de Séville cumule plusieurs records : composé en deux semaines, Giaccomo a vingt-quatre ans, il en est  à son dix-septième opéra ! Pourtant la Première à Rome le 20 février 1816, ne laisse aucunement présager un tel succès : Rossini fit face à bien des déboires .. La guitare du comte Almaviva sonne faux, alors il  s’arrête pour l’accorder.. La salle rit…  Il reprend, une corde casse entraînant l’ hilarité générale. Un peu plus tard, l’interprète de Basilio tombe dans une trappe au moment d’entrer en scène, se casse à moitié le nez et chante l’ Air de la calomnie en tamponnant son appendice avec un mouchoir qui vire au rouge-sang ! Le public se tord de rire. Vous pensez que c’est assez pour cette représentation ? Que nenni ! A la fin du 1er acte, un chat entre sur scène et se frotte voluptueusement contre les jambes des chanteurs. A la fin du spectacle, le public se déchaîne en sifflets. Rossini se lève, applaudit ses chanteurs et rentre chez lui. A chacune de ses créations, il écrivait à sa mère pour lui décrire la soirée : ce soir-là, il dessine sur toute la page une très grande bouteille car, en italien, bouteille se dit… fiasco ! Depuis cette première catastrophique, le Barbier s’est hissé au rang des plus célèbres opéras italiens.

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Le jeune Rossini en 1820., © Bibliothèque Nationale de France

Puis viendront La gazzettaOtello (1816), La Cenerentola (d’après Cendrillon)La gazza ladraArmidaAdelaide di Borgogna (1817) Mosè in EgittoAdinaRicciardo e Zoraide (1818), Ermione, Eduardo e CristinaLa donna del lagoBianca e Falliero (1819), Maometto II (1820), Matilde di Shabran (1821), Zelmira (1822), Semiramide (1823), Il viaggio a Reims (1825), IvanhoéLe Siège de Corinthe (1826) Moïse et Pharaon (1827), Le Comte Ory (1828), Guillaume Tell (1829) directement inspiré du drame de Schiller Wilhelm Tell mettra fin à sa grande période lyrique. Il va fêter ses 37 ans après avoir livré à la création, 37 opéras. 

Vint sa seconde période, où  il se consacre à la musique sacrée et va composer ces petits Péchés de ma vieillesse aux titres à la Erik Satie   «  Prélude hygiénique du matin»,  « Quatre hors d’œuvre (Radis, Anchois, Cornichons et Beurre) », « Ouf, les petits pois », « Hachis romantique », « Petite valse à l’huile de ricin »…  180 morceaux de tous genres, principalement pour piano. Mais ne nous y trompons pas, nombres de ces « péchés » nécessitent une grande virtuosité de la part des interprètes.

Il s’éteint à 19 ans..  il était né un 29 février.

Il avait un solide sens de l’humour. J’aime cette anecdote entretenu par lui-même pour discréditer Wagner qu’il n’aimait pas :  jouant un jour, au piano, une partition de Richard Wagner – qu’il détestait – , Rossini n’en tirait que des sons cacophoniques ; un de ses élèves, s’approchant, lui dit : « Maestro, vous tenez la partition à l’envers ! », ce à quoi Rossini répondit : « J’ai essayé en la mettant dans l’autre sens : c’était pire ! »

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Rossini, le gastronome

Le maestro est bien gourmand, grand amateur de gastronomie et de vins rares.  Stendhal, grand admirateur et pourtant pourfendeur de Rossini, le décrit comme étant « énorme » et « mangeant comme trois ogres ». Il fréquentait assidûment La Tour d’Argent, Bofinger et la Maison dorée où il avait une table attitrée à chaque lieu. Ses faiblesses ? Les raviolis au parmesan et les huîtres. Il fut également auteur d’un Livre de cuisine. Quant au célèbre tournedos Rossini, nul ne connaît le véritable créateur : était-ce son ami Antonin Carême célèbre cuisinier et ami ? Casimir Moisson chef de la Maison Dorée, ou peut-être Rossini lui-même? Ce dont nous sommes sûrs est que Rossini aimait confectionner des plat à base de foie gras et de truffes.

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Apprentie-sage, à la fois frivole et mystique, lègère et spirituelle , gourmande et orthorexique, férue de nutrition, en recherche de sagesse

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